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FASCICULE 97

 

 

L'ÉVOLUTION DU CONCEPT DE DIEU CHEZ LES HÉBREUX

LES chefs spirituels des Hébreux accomplirent ce que personne avant eux n'avait réussi à faire -- ils          « désanthropomorphisèrent » leur concept de Dieu sans le convertir en une abstraction de la Déité, intelligible aux seuls philosophes. Sous ce concept mûri, même les gens du commun furent capables de considérer Jéhovah comme un père, sinon des individus, du moins de la race.

Le concept de la personnalité de Dieu avait été clairement enseigné à Salem à l'époque de Melchizédek. Il était vague et embrumé au temps de l'exode d'Égypte et n'évolua que graduellement de génération en génération dans la pensée hébraïque, en réponse aux enseignements des chefs spirituels. La perception de la personnalité de Jéhovah suivit une évolution beaucoup plus continue que celle de bien d'autres attributs de la Déité. Depuis Moïse jusqu'à Malachie, la représentation mentale de la personnalité de Dieu subit une croissance à peu près ininterrompue dans la pensé hébraïque, et finalement ce concept fut exalté et glorifié par les enseignements de Jésus sur le Père céleste.

1. -- SAMUEL — LE PREMIER DES PROPHÈTES HÉBREUX

La pression hostile des peuples environnant la Palestine enseigna bientôt aux cheiks hébreux qu'ils ne pouvaient espérer survivre sans confédérer leurs organisations tribales en un gouvernement centralisé. Cette concentration de l'autorité administrative fournit à Samuel une meilleure occasion d'opérer comme instructeur et réformateur.

Samuel était issu d'une longue lignée d'éducateurs de Salem qui avaient persisté à maintenir les vérités de Melchizédek comme une partie de leurs formes de culte. Il était viril et résolu. Seule sa grande dévotion, doublée de son extraordinaire détermination, lui permit de résister à l'opposition quasi-universelle qu'il rencontra au début de ses efforts pour ramener Israël à l'adoration du Jéhovah suprême de l'époque de Moïse. Même alors, il n'obtint qu'un succès partiel; il ne gagna au concept supérieur de Jéhovah que la moitié la plus intelligente des Hébreux; l'autre moitié continua à croupir dans l'adoration des dieux tribaux de la contrée et dans les basses conceptions de Jéhovah.

Samuel était un type d'homme taillé à la hache, un réformateur pratique capable de sortir un jour avec ses amis et de démolir une vingtaine de lieux réservés à Baal. C'est purement par la force de la contrainte qu'il fit accomplir des progrès; il prêcha peu, il enseigna encore moins, mais il agit. Un jour il se moquait des prêtres de Baal, le lendemain il coupait en morceaux un roi captif. Il croyait pieusement au Dieu unique et avait une conception claire de ce Dieu comme créateur du ciel et de la terre: « Les colonnes de la terre appartiennent au Seigneur, et il a posé le monde sur elles (1).

La grande contribution que Samuel apporta au développement du concept de la Déité fut son annonce retentissante que Dieu était invariant, qu'il personnifiait toujours la même perfection et la même divinité infaillibles. À cette époque, on croyait que Jéhovah était un Dieu d'humeur changeante, regrettant toujours d'avoir fait ceci ou cela. Maintenant, pour la première fois depuis qu'ils étaient sortis d'Égypte, les Hébreux entendirent ces paroles saisissantes: « La Force d'Israël ne ment point et ne se repent point, car il n'est as un homme pour se repentir » (2). La stabilité dans les relations avec la Divinité était proclamée. Samuel réitéra l'alliance de Melchizédek avec Abraham et déclara que le Seigneur Dieu d'Israël était la source de toute vérité, de toute permanence, et de toute constance. Les Hébreux avaient toujours considéré leur Dieu comme un homme, un surhomme, un esprit élevé d'origine inconnue, mais maintenant ils entendaient l'esprit d'Horeb de jadis exalté comme un Dieu immuable dans sa perfection de créateur. Samuel aidait le concept évoluant de Dieu à s'élever au-dessus de l'état changeant de la pensée humaine et des vicissitudes de l'expérience terrestre. Sous l'influence de ses enseignements, le Dieu des Hébreux commençait son ascension, partant d'une idée sur la hiérarchie des dieux tribaux pour aboutir à l'idéal d'un tout-puissant et immuable Créateur et Superviseur de toute la création.

  (1) 1 Samuel II-8.
  (2) I Samuel XV-29.

À nouveau il prêcha l'histoire de la sincérité de Dieu et de la confiance que l'on pouvait mettre en lui pour maintenir l'alliance. Samuel dit: « Le Seigneur n'abandonnera point son peuple ». « Il a établi avec nous une alliance éternelle, bien ordonnée à tous égards, et certaine » (3). Ainsi résonnait dans toute la Palestine l'appel au retour à l'adoration de Jéhovah suprême. L'énergique éducateur proclamait toujours: « Tu es grand, ô Seigneur Dieu, car il n'est personne de semblable à toi, et il n'y a pas de Dieu en dehors de toi ».

Jusque-là les Hébreux avaient principalement considéré la faveur de Dieu en termes de prospérité matérielle. La proclamation suivante de Samuel fut un grand choc pour Israël et faillit coûter la vie à son auteur: « Le Seigneur enrichit et appauvrit; il exalte et il abaisse. Il tire les pauvres de la poussière et il élève les mendiants au rang des princes pour leur faire hériter le trône de gloire » (4). Jamais depuis Moïse des promesses aussi encourageantes pour les humbles et les moins fortunés n'avaient été proclamées; des milliers de désespérés parmi les pauvres commencèrent à espérer qu'ils pourraient améliorer leur statut spirituel.

  (3) II Samuel XXIII-5.
  (4) I Samuel II-7.

Samuel ne progressa pas bien loin au-delà du concept d'un dieu tribal. Il proclama un Jéhovah créateur de tous les hommes, mais s'intéressant principalement aux Hébreux, son peuple élu. Même alors, comme au temps de Moïse, le concept de Dieu dépeignait une Déité sainte et intègre: « Nul n'est saint comme l'Éternel. Qui peut-on comparer au saint Seigneur Dieu? »

Les années passant, le vieux chef grisonnant progressa dans la compréhension de Dieu, car il déclara: « l'Éternel est un Dieu de connaissance, et par lui les actions sont pesées. Le Seigneur jugera les confins de la terre, témoignant de la miséricorde aux miséricordieux, et il sera droit aussi avec l'homme intègre »(5). C'est ici que se place l'aurore de la miséricorde, bien qu'elle y soit limitée à ceux qui la pratiquent. Plus tard, Samuel fit encore un pas en avant lorsqu'il exhorta le peuple dans l'adversité « Remettons-nous maintenant aux mains du Seigneur, car ses miséricordes sont grandes ». « Rien n'empêche l'Éternel de sauver beaucoup ou peu de gens » (6).

  (5) I Samuel II-3, 10, etc.
  (6) I Samuel XIV-6.

Ce développement graduel du concept du caractère de Jéhovah se poursuivit sous le ministère des successeurs de Samuel. Ils essayèrent de présenter Jéhovah comme un Dieu gardant son alliance, mais n'avancèrent pas à la même allure que Samuel; ils ne réussirent pas à développer l'idée de ,a miséricorde divine telle que Samuel avait fini par la concevoir. Il se produisit un recul régulier vers la récognition d'autres dieux, malgré l'affirmation que Jéhovah était au-dessus de tous. « Le royaume est à toi, ô Éternel, et tu es exalté comme chef sur tous ».

L'accent de cette époque était mis sur le pouvoir divin; les prophètes d'alors prêchaient une religion destinée à maintenir le roi sur le trône hébreu, « A toi Seigneur appartiennent la grandeur, la puissance, la gloire, la splendeur, et la majesté. Ta main détient le pouvoir et la puissance, et tu peux agrandir et affermir toutes choses » (7). Tel était le statut du concept de Dieu à l'époque de Samuel et de ses successeurs immédiats.

  (7) 1 Chroniques XXIX-11.

2. -- ÉLIE ET ÉLISÉE

Au dixième siècle avant le Christ, la nation hébraïque se divisa en deux royaumes. Dans ces deux divisions politiques, de nombreux éducateurs de la vérité s'efforcèrent d'endiguer le flot réactionnaire de décadence spirituelle qui s'amorçait et qui continua désastreusement après la guerre de séparation. Ces efforts pour faire progresser la religion hébraïque ne portèrent pas de fruits avant le commencement des enseignements d'Élie en faveur de la droiture. Ce guerrier résolu et intrépide restaura dans le royaume du nord un concept de Dieu comparable à celui qui existait au temps de Samuel. Élie eut peu d'occasions de présenter une conception évoluée de Dieu; il était trop occupé, comme Samuel avant lui, à renverser les autels de Baal et à démolir les idoles des faux dieux. Il effectua ses réformes en affrontant l'opposition d'un monarque idolâtre. Sa tâche fut encore plus gigantesque et difficile que celle à laquelle Samuel avait fait face.

Quand Élie fut appelé à quitter la terre, Élisée, son fidèle compagnon, reprit son oeuvre et maintint la lumière de la vérité vivante en Palestine avec l'aide inappréciable de Michée, un prophète peu connu.

Ce ne fut pas une époque de progrès dans le concept de la Déité. Les Hébreux ne s'étaient même pas encore élevés à la hauteur de l'idéal de Moïse. À la clôture de l'époque d'Élie et d'Élisée, les meilleures classes d'Hébreux revenaient à l'adoration du suprême Jéhovah, et la restauration de l'idée du Créateur Universel se trouvait à peu près au point où Samuel l'avait laissée.

3. -- JÉHOVAH ET BAAL

L'interminable controverse entre les fidèles de Jéhovah et les partisans de Baal fut un conflit socio-économique d'idéologies plutôt qu'un différend de croyances religieuses.

Les habitants de la Palestine avaient des comportements différents au sujet de la propriété privée de la terre. Les tribus méridionales ou errantes (les Yahvistes) considéraient la terre comme inaliénable -- comme un don de la Déité au clan. Elles estimaient que la terre ne devait être ni vendue ni hypothéquée.     « Jéhovah a parlé et dit: la terre ne sera pas vendue car le pays est à moi » (1).

  (1) Lévitique XXV-23.

Les Cananéens du nord (les Baalites) plus stables achetaient, vendaient, et hypothéquaient leurs terres sans restriction. Le mot Baal signifie propriétaire. Le culte de Baal était fondé sur deux doctrines principales: premièrement la validité des échanges de biens, des contrats, et des alliances -- le droit d'acheter et de vendre des terres; deuxièmement Baal était censé envoyer la pluie -- il était le dieu de la fertilité du sol. Les bonnes récoltes dépendaient de la faveur de Baal. Le culte concernait largement les terres, leur propriété et leur fertilité.

En général, les Baalites possédaient des terres des maisons, et des esclaves. Chaque Baal avait son lieu sacré, sa prêtrise, et ses « saintes femmes », les prostituées rituelles.

La divergence fondamentale des points de vue sur les terres fit naître les implacable antagonismes de comportement social,moral, et religieux entre les Cananéens et les Hébreux. Cette controverse socio-économique ne devint pas une affaire nettement religieuse avant l'époque d'Élie. À partir de l'intervention de ce prophète agressif, la lutte se déroula sur un plan plus strictement religieux -- Jéhovah contre Baal -- et se termina par la victoire de Jéhovah et la poussée subséquente vers le monothéisme.

Élie fit passer la controverse Jéhovah-Baal de l'aspect foncier à l'aspect religieux des idéologies hébraïque et cananéenne. Quand Ahab fit assassiner Naboth et sa famille au cours de l'intrigue pour s'emparer de leurs terres, Élie s'attaqua aux anciennes moeurs foncières; il en fit une question morale et lança sa vigoureuse campagne contre les Baalites. Ce fut aussi une lutte des paysans contre la domination par les citadins. C'est principalement sous l'influence d'Élie que Jéhovah devint Elohim. Le prophète débuta comme réformateur agraire et termina en exaltant la Déité. Les Baals étaient nombreux et Jéhovah était unique -- le monothéisme triompha du polythéisme.

4. -- AMOS ET OSÉE

Une grande étape fut franchie par Amos dans la transition entre le dieu tribal -- le dieu qui avait si longtemps été servi au moyen de sacrifices et de cérémonies, le Jéhovah des premiers Hébreux -- et un Dieu qui punissait le crime et l'immoralité même chez son propre peuple. Amos apparut, venant des montagnes du sud, pour dénoncer la criminalité, l'ivrognerie, l'oppression, et l'immortalité des tribus du nord. Jamais depuis l'époque de Moïse, des vérités aussi éclatantes n'avaient été proclamées en Palestine.

Amos ne se borna pas simplement à restaurer ou à réformer; il découvrit aussi de nombreux concepts de la Déité. Il répéta au sujet de Dieu beaucoup de proclamations déjà faites par ses prédécesseurs, et attaqua courageusement la croyance en un Être divin autorisant le péché dans son propre peuple dit élu. Pour la première fois depuis l'époque de Melchizédek, les oreilles humaines entendirent proclamer le double critère de la justice et de la moralité nationales. Pour la première fois dans l'histoire, des Hébreux entendirent de leurs propres oreilles que leur Dieu Jéhovah ne tolérerait pas plus le crime et le péché dans leur vie que dans celle des membres de n'importe quel autre peuple. Amos eut la vision du Dieu sévère et juste de Samuel et d'Élie, mais il vit aussi un Dieu qui ne faisait aucune distinction entre les Hébreux et toute autre nation quand on en venait à punir la malfaisance. C'était une attaque directe contre la doctrine égoïste du    « peuple élu », et un bon nombre d'Hébreux de l'époque en furent profondément froissés.

Amos dit: « Cherchez celui qui a formé les montagnes et fait lever le vent, celui qui a créé les Pléiades et Orion, qui change en matin l'ombre de la mort et rend le jour aussi sombre que la nuit » (1). En dénonçant ses contemporains opportunistes, mi-religieux, et parfois immoraux, il chercha à décrire la justice inexorable d'un Jéhovah invariant en disant des malfaisants: « Même s'ils pénètrent jusque dans l'enfer, de là ma main les prendra, et même s'ils montent dans les cieux, de là je les ferai descendre,... et même s'ils vont en captivité devant leurs ennemis, là je commanderai à l'épée de la justice, et elle les tuera » (2). Amos effraya encore davantage ses auditeurs en dirigeant vers eux un doigt réprobateur et accusateur et en déclarant au nom de Jéhovah: « Sûrement je n'oublierai aucune de vos oeuvres... et je passerai au crible la maison d'Israël parmi toutes les nations, comme on secoue le blé dans un tamis » (3).

  (1) Amos V-8.
  (2) Amos IX-2 et 4.
  (3) Amos IX-9.

Amos proclama que Jéhovah était le « Dieu de toutes les nations » et avertit les Israélites que le rituel ne devait pas se substituer à la droiture. Avant que ce courageux éducateur ne fût lapidé à mort, il avait répandu assez de levain de la vérité pour sauver la doctrine du Jéhovah suprême; il avait assuré la suite évolutionnaire de la révélation de Melchizédek.

Osée suivit Amos et sa doctrine d'un Dieu universel de justice en ressuscitant le concept mosaïque d'un Dieu d'amour. Osée prêcha le pardon par repentir, et non par sacrifice. Il proclama un évangile de bonté aimante et de miséricorde divine en disant au nom de Jéhovah: « Je vous fiancerai à moi pour toujours, oui, je vous fiancerai à moi en droiture et en jugement et en bonté aimante et en miséricorde. Je vous fiancerai même à moi en fidélité » (4).

  (4) Osée II-19.

Osée continua fidèlement les avertissements moraux d'Amos en disant de Dieu: « Je les châtierai à mon   gré » (5). Mais les Israélites considérèrent comme une cruauté frisant la trahison les paroles suivantes qu'il prononça: « Je dirai à ceux qui n'étaient pas mon peuple: vous êtes mon peuple; et eux diront: tu es notre Dieu » (6). Il continua à prêcher le repentir et le pardon en disant: « Je guérirai leur récidive. Je les aimerai abondamment, car ma colère s'est détournée ». Osée proclama constamment l'espoir et le pardon. L'essentiel de son message fut toujours: « J'aurai de la miséricorde pour mon peuple. Ils ne connaîtront pas d'autre Dieu que moi, car je suis le seul qui sauve ».

  (5) Osée X-10.
  (6) Osée II-23.

Amos vivifia la conscience nationale des Hébreux en leur faisant reconnaître que Dieu ne pardonnerait pas le crime et le péché parmi eux sous prétexte qu'ils étaient censément le peuple élu. De son côté, Osée fit résonner les notes d'ouverture des miséricordieux choeurs ultérieurs de compassion divine et de bonté aimante qui furent si délicieusement chantés par Isaïe et ses compagnons.

5. -- LE PREMIER ISAÏE

Ce fut une époque où certains proclamaient des menaces de punition pour les péchés personnels et les crimes nationaux des clans du nord, tandis que d'autres prédisaient des calamités en châtiment des transgressions du royaume du sud. Ce fut dans le sillage de ce réveil de conscience des deux nations hébraïques que le premier Isaïe fit son apparition.

Isaïe continua à prêcher la nature éternelle de Dieu, sa sagesse infinie, la perfection immuable avec laquelle on pouvait compter sur lui. Il représenta le Dieu d'Israël comme disant: « J'ajusterai exactement le jugement et j'alignerai la droiture sur le fil à plomb ». « Le Seigneur vous reposera de vos chagrins, de vos peurs, et de la dure servitude où l'homme a été créé pour servir ». « Vos oreilles entendront une parole prononcée derrière vous et disant: voici le chemin, marchez-y » (1). « Voyez, Dieu est mon salut; j'aurai confiance et ne serai pas effrayé, car le Seigneur est ma force et ma chanson ». « Venez à moi et raisonnons ensemble, dit l'Éternel: si vos péchés sont comme l'écarlate, ils deviendront blancs comme la neige; s'ils sont rouges comme le cramoisi, ils seront comme la laine » (2).

  (1) Isaïe XXX.
  (2) Isaïe I-18.

Parlant aux âmes affamées des Hébreux tourmentés par la peur, ce prophète dit: « Lève-toi et resplendis, car ta lumière est venue et la gloire du Seigneur s'est levée sur toi » (3). « L'esprit du Seigneur est sur moi parce qu'il m'a oint pour apporter de bonnes nouvelles aux débonnaires; il m'a envoyé pour panser ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer la liberté aux captifs, et l'ouverture de la prison à ceux qui sont enchaînés » (4). « Je me réjouirai grandement en l'Éternel, mon âme s'égayera en mon Dieu, car il m'a revêtu des vêtements du salut et m'a recouvert de sa robe de justice » (5). « Dans toutes leurs détresses, il a été affligé, et l'ange de sa présence les a sauvés. Dans son amour et sa miséricorde, il les a rachetés »(6).

  (3) Isaïe LX-1.
  (4) Isaïe LXI-1.
  (5) Isaïe LXI-10.
  (6) Isaïe LXIII-9.

Cet Isaïe fut suivi de Michée et d'Abdias, qui confirmèrent et embellirent son évangile satisfaisant l'âme. Ces deux vaillants messagers dénoncèrent audacieusement le rituel pratiqué par les Hébreux sous l'empire des prêtres et attaquèrent avec intrépidité tout le système sacrificiel.

Michée critiqua « les chefs qui jugent pour des présents, les prêtres qui enseignent pour un salaire, et les prophètes qui devinent pour de l'argent » (7). Il enseigna la venue d'un jour où l'on serait libéré des superstitions et de la prêtrise, en disant: « Chaque homme se reposera sous sa propre vie et nul ne l'effrayera, car tout le peuple vivra, chacun se conformant à la manière dont il comprend Dieu ».

  (7) Michée III-11.

Michée prêcha toujours les obligations suivantes dans son message: « Viendrai-je devant Dieu avec des offrandes brûlées? l'Éternel voudra-t-il agréer mille béliers ou dix mille torrents d'huile? Donnerai-je mon premier né pour ma transgression, le fruit de mon corps pour le péché de mon âme? Il m'a déclaré, ô l'homme, ce qui est bon. Et que réclame l'Éternel de ta part sinon que tu agisses avec justice, que tu aimes la miséricorde et que tu marches humblement avec ton Dieu » (8). Ce fut en vérité une grande époque au cours de laquelle les mortels entendirent, et certains allèrent même jusqu'à croire, ces messages émancipateurs d'il y a plus de deux mille cinq cents ans. Sans la résistance obstinée des prêtres, ces éducateurs auraient aboli tout le cérémonial sanguinaire du rituel hébreu d'adoration.

  (8) Michée VI-6 à 8.

6. -- JÉRÉMIE L'INTRÉPIDE

Plusieurs éducateurs continuèrent à exposer l'évangile d'Isaïe, mais il appartenait à Jérémie de franchir audacieusement l'étape suivante de l'internationalisation de Jéhovah, Dieu des Hébreux.

Jérémie déclara avec intrépidité que Jéhovah n'était pas du côté des Hébreux dans leurs guerres militaires contre d'autres nations. Il affirma que Jéhovah était le Dieu de toute la terre, de toutes les nations, et de tous les peuples. L'enseignement de Jérémie fut le crescendo de la marée montante pour internationaliser le Dieu d'Israël. Ce prédicateur intrépide proclama une fois pour toutes que Jéhovah était le Dieu de toutes les nations, et qu'il n'existait ni d'Osiris pour les Égyptiens, ni de Bel pour les Babyloniens, ni d'Assur pour les Assyriens, ni de Dagon pour les Philistins. À cette époque et par la suite, la religion des Hébreux participa ainsi à la renaissance du monothéisme dans le monde entier; enfin le concept de Jéhovah s'était élevé à un niveau divin comportant une dignité planétaire et même cosmique.

Toutefois, bien des compagnons de Jérémie trouvèrent difficile de concevoir Jéhovah indépendamment de la nation hébraïque.

Jérémie fit également des sermons sur le Dieu juste et aimant décrit par Isaïe; il déclara: « Oui, je vous ai aimés d'un amour éternel; c'est pourquoi je vous ai attirés avec amouret bonté » (1). « Car il n'afflige pas volontiers les enfants des hommes » (2).

Ce prophète intrépide a dit encore « Notre Seigneur est droit, grand dans ses conseils, et puissant dans ses oeuvres. Ses yeux sont ouverts sur toutes les voies des fils des hommes pour donner à chacun selon ses voies et selon le fruit de ses actions » (3). Mais les paroles suivantes, prononcées durant le siège de Jérusalem, furent considérées comme une trahison blasphématoire: « Et maintenant j'ai livré ce pays entre les mains Nébucadnetsar, roi de Babylone, mon serviteur » (4). Quand Jérémie conseilla la reddition de la ville, les prêtres et les chefs civils le jetèrent dans la boue d'un sombre cul de basse-fosse.

  (1) Jérémie XXXI-3.
  (2) Lamentations de Jérémie III-33.
  (3) Jérémie XXXII-19.
  (4) Jérémie XXIX-21 et XLIII-10.

7. - LE SECOND ISAÏE

La destruction de leur nation et la captivité des Hébreux en Mésopotamie auraient fait faire de grands progrès à leur théologie en expansion si elle n'avait pas rencontré l'opposition résolue de leur prêtrise. La nation hébraïque avait succombé devant les armées de Babylone, et son Jéhovah nationaliste avait souffert des sermons internationalistes des dirigeants spirituels. Ce fut le ressentiment de la perte de leur dieu national qui amena les prêtres à aller aussi loin dans l'invention des fables et de la multiplicité d'événements apparus miraculeusement dans l'histoire hébraïque; ils voulaient rétablir les Juifs comme peuple élu, même du Dieu de toutes les nations sous son aspect d'une idée nouvelle et internationalisée.

Durant leur captivité, les Juifs furent très influencés par les traditions et légendes babyloniennes. Il faut cependant remarquer qu'ils améliorèrent systématiquement le ton moral et la signification spirituelle des histoires chaldéennes qu'ils adoptèrent, bien qu'ils eussent invariablement déformé ces légendes pour en faire rejaillir de l'honneur et de la gloire sur l'ascendance et l'histoire d'Israël.

Les prêtres et les scribes hébreux n'avaient qu'une seule idée en tête, celle de réhabiliter la nation juive, de glorifier les traditions hébraïques, et d'exalter leur histoire raciale. Si l'on éprouve du ressentiment devant le fait que ces prêtres ont insufflé leurs idées erronées à une si grande partie du monde occidental, il faut se rappeler qu'ils ne le firent pas intentionnellement. Ils ne prétendaient ni écrire sous une inspiration ni rédiger un livre sacré. Ils préparaient simplement un manuel destiné à ranimer le courage faiblissant de leurs compagnons de captivité. Ils avaient nettement pour but d'améliorer l'esprit national et de relever le moral de leurs compatriotes. Il appartenait à des hommes apparus plus tard de réunir ces écrits, ainsi que certains autres, en un livre guide dont les enseignements furent supposés infaillibles.

Les prêtres juifs utilisèrent libéralement ces écrits après leur retour de captivité, mais leur influence sur leurs compagnons de captivité fut grandement entravée par la présence d'un jeune et indomptable prophète, Isaïe le second, qui était pleinement converti au Dieu de justice, d'amour, de droiture, et de miséricorde d'Isaïe l'aîné. Il croyait aussi, avec Jérémie, que Jéhovah était devenu le Dieu de toutes les nations. Il prêcha ces théories sur la nature de Dieu avec un succès tellement marqué qu'il fit autant de convertis parmi les Juifs que parmi ceux qui les avaient déportés. Ce jeune prédicateur laissa par écrit ses enseignements que les prêtres hostiles et implacables cherchèrent à dissocier complètement d'avec lui; cependant, par pur et simple respect pour leur beauté et leur grandeur, les enseignements du second Isaïe furent incorporés dans les écrits du premier Isaïe. Ils forment maintenant les chapitres 40 à 55 inclus du livre qui porte son nom.

Depuis Machiventa jusqu'à l'époque de Jésus, nul prophète ou éducateur religieux n'atteignit le haut concept de Dieu que le second Isaïe proclama durant la période de captivité. Pour ce chef spirituel, il ne s'agissait pas d'un Dieu mesquin, anthropomorphe, créé par des hommes: « Voici, il enlève les îles comme des poussières » (1). « De même que les cieux sont plus élevés que la terre, mes voies sont plus élevées que vos voies, et mes pensées plus hautes que vos pensées » (2).

Machiventa pouvait enfin voir des éducateurs humains proclamer aux mortels un Dieu véritable. Comme le premier Isaïe, ce chef prêcha un Dieu ayant créé l'univers et continuant à le maintenir. « J'ai créé la terre, et l'ai mis l'homme dessus. Je ne l'ai pas créée en vain, je l'ai formée pour quelle soit habitée » (3). « Je suis le premier et le dernier; il n'y a point de Dieu en dehors de moi ». Parlant au nom du Seigneur Dieu d'Israël, ce nouveau prophète dit: « Les cieux peuvent disparaître et la terre vieillir, mais ma droiture subsistera toujours et mon salut durera de génération en génération». « Ne craignez point, car je suis avec vous; ne soyez pas consternés, car je suis votre Dieu ». « Il n'y a point de Dieu en dehors de moi -- un Dieu juste et un Sauveur » (4).

  (1) Isaïe XL-15.
  (2) Isaïe LV-8.
  (3) Isaïe XLV-18.
  (4) Isaïe XLIII-11.

Les captifs juifs furent réconfortés comme des millions d'autres hommes depuis lors, en entendant des paroles telles que: « Ainsi dit le Seigneur, je vous ai créés, je vous ai rachetés, je vous ai appelés par votre nom; vous êtes à moi »(5). « Lorsque vous passerez à travers les eaux, je serai avec vous, car vous êtes précieux à ma vue ». « Une femme peut-elle oublier son nourrisson et n'avoir pas de compassion pour son fils? Oui, elle peut oublier, mais moi je n'oublierai pas mes enfants car voici, j'ai gravé leur nom sur la paume de mes mains » (6). « Que le méchant abandonne ses voies et l'homme inique ses pensées, et qu'ils retournent à l'Éternel, car il aura compassion d'eux; qu'ils reviennent à notre Dieu, car il pardonne abondamment » (7).

Ecoutez à nouveau l'évangile de cette nouvelle révélation du Dieu de Salem: « Il paîtra son troupeau comme un berger; il rassemblera les agneaux dans ses bras et les portera sur son sein. Il donne du pouvoir aux timides et il accroît la force de ceux qui n'ont pas de puissance. Ceux qui attendent l'Éternel renouvelleront leur vigueur; ils s'élèveront avec des ailes, tels des aigles; ils courront et ne seront pas fatigués; ils marcheront et ne seront pas affaiblis » (8).

  (5) Isaïe XLIII-1.
  (6) Isaïe XLIX-15 et 16.
  (7) Isaïe LV-7.
  (8) Isaïe XL-31.

Ce second Isaïe mena une vaste propagande évangélique en faveur du concept élargi d'un Jéhovah suprême. Il rivalisa avec Moïse par l'éloquence avec laquelle il décrivit le Seigneur Dieu d'Israël comme le Créateur Universel. Il fut poétique dans sa description des attributs infinis au sujet du Père céleste. Au même titre que les Psaumes, les écrits d'Isaïe comptent parmi les présentations les plus sublimes et les plus véridiques du concept spirituel de Dieu qui aient jamais atteint les oreilles des mortels avant l'arrivée de Micaël sur Urantia. Ecoutez son portrait de la Déité: « Je suis le haut et le sublime qui habite l'éternité ». « Je suis le premier et le dernier, et il n'y a pas d'autre Dieu en dehors de moi ». « Et la main du Seigneur n'est pas si courte qu'il ne puisse sauver, ni son oreille bouchée pour l'empêcher d'entendre ». Ce fut une nouvelle doctrine pour les populations juives que d'entendre ce prophète bénin mais plein d'autorité, persister dans sa prédication sur la constance divine, la fidélité de Dieu. Il déclara que « Dieu n'oublierait pas et n'abandonnerait pas ».

Cet audacieux éducateur proclama que l'homme était très étroitement lié à Dieu « J'ai créé pour ma gloire chacun de ceux qui s'appellent de mon nom, et ils proclameront ma louange. C'est moi, oui moi, qui efface leurs transgressions par égard pour moi-même, et je ne me souviendrai pas de leurs péchés ».

Écoutez ce grand Hébreu démolir le concept d'un Dieu national, tandis qu'en gloire il proclame la divinité du Père Universel dont il dit: « Les cieux sont mon trône, et la terre est mon marchepied »(9). Le Dieu d'Isaïe n'en était pas moins saint, juste, majestueux, et insondable. Le concept du coléreux, vindicatif, et jaloux Jéhovah des Bédouins du désert avait presque disparu. Un nouveau concept du Jéhovah suprême et universel était apparu dans la pensée des mortels pour ne jamais plus être perdu de vue par l'humanité. La conception claire de la nouvelle justice avait commencé la destruction de la magie primitive et de la peur biologique. L'homme était enfin introduit dans un univers de loi et d'ordre et présenté à un Dieu universel sur lequel il pouvait compter et qui possédait des attributs.

  (9) Isaïe LXVI-1.

Isaïe, prédicateur d'un Dieu céleste, ne cessa mais de proclamer le Dieu d'amour. « J'habite le haut lieu élevé et saint, et aussi avec celui dont l'esprit est contrit et humble » (10). Ce grand éducateur adressa encore à ses contemporains de nouvelles paroles d'encouragement: « Et l'Éternel te guidera continuellement et satisfera ton âme. Tu seras comme un jardin arrosé, comme une source où l'eau ne manque pas. Si l'ennemi vient sur toi comme une inondation, l'esprit de l'Éternel élèvera une défense contre lui » (11). Une fois de plus l'évangile de Melchizédek, destructeur de la peur, et la religion de Salem, nourrissant la confiance, brillèrent pour la bénédiction de l'humanité.

  (10) Isaïe LVII-15.
  (11) Isaïe LIX-19.

Le clairvoyant et courageux Isaïe éclipsa efficacement le Jéhovah nationaliste par son portrait sublime de la majesté et de l'omnipotence universelle du suprême Jéhovah, Dieu d'amour, souverain de l'univers, et Père affectueux de toute l'humanité. Depuis ces jours mémorables, le concept supérieur de Dieu en Occident a toujours englobé la justice universelle, la miséricorde divine, et la droiture éternelle. Dans un langage superbe et avec une grâce incomparable, ce grand instructeur décrivit le Créateur tout-puissant comme le Père aimant tout le monde.

Le second Isaïe prêcha Dieu à ses compatriotes et à des étrangers de bien des nations, qui l'écoutaient au bord du fleuve à Babylone. Ce prophète de la captivité contribua beaucoup à neutraliser les nombreuses conceptions fausses et racialement égoïstes de la mission du Messie promis, mais il ne réussit pas entièrement dans ses efforts. Si les prêtres ne s'étaient pas adonnés à bâtir un nationalisme mal conçu, les enseignements des deux Isaïe auraient préparé la voie à la récognition et à la réception du Messie attendu.

8. -- HISTOIRE SAINTE ET HISTOIRE PROFANE

L'habitude de considérer le récit des expériences des Hébreux comme l'histoire sainte, et les opérations du reste du monde comme l'histoire profane est responsable d'une grande partie de la confusion qui existe dans la pensée humaine au sujet de l'interprétation de l'histoire. Cette difficulté s'éleva parce qu'il n'existe pas d'histoire laïque dis Juif. Durant l'exil à Babylone, les prêtres commencèrent par préparer un nouveau récit des rapports, supposés miraculeux, de Dieu avec les Hébreux -- l'histoire sainte d'Israël relatée dans l'Ancien Testament. Ensuite ils détruisirent soigneusement et complètement les archives existantes des affaires hébraïques -- les livres tels que « Les Actes des Rois d'Israël » et « Les Actes des Rois de Juda », ainsi que divers récits plus ou moins exacts de l'histoire des Hébreux.

La pression accablante et la contrainte irrésistible de l'histoire laïque terrorisaient les Juifs captifs et gouvernés par des étrangers, au point qu'ils tentèrent de récrire et de refondre complètement leur histoire. Pour bien comprendre ce point, il est bon de passer brièvement en revue le compte rendu de leur troublante expérience nationale. Il faut se rappeler que les Juifs ne réussirent pas à dégager une philosophie adéquate et non-théologique de la vie. Ils luttèrent avec leur conception originelle et égyptienne de récompenses divines pour la droiture et de sévères punitions pour le péché. La dramatique histoire de Job fut quelque peu une protestation contre cette philosophie erronée. Le franc pessimisme de l'Ecclésiaste fut une sage réaction terrestre contre les croyances trop optimistes en la Providence.

Mais cinq cents ans de suzeraineté par des chefs étrangers dépassaient la mesure, même pour les Juifs patients et endurants. Les prophètes et les prêtres commencèrent a crier « Jusques à quand, Seigneur, jusques à quand? (1) » Quand un Juif honnête sondait les Écritures, la confusion de ses pensées s'aggravait encore. Un ancien voyant avait promis que Dieu protégerait et délivrerait son « Peuple élu ». Amos avait formulé la menace que Dieu abandonnerait Israël si ce peuple ne rétablissait pas ses critères de droiture nationale. Le scribe du Deutéronome avait décrit le Grand Choix -- entre le bien et le mal, entre la bénédiction et la malédiction. Le premier Isaïe avait prêché un bienfaisant roi-libérateur. Jérémie avait proclamé une ère de droiture intérieure -- l'alliance écrite sur les tablettes du coeur. Ézéchielavait proclamé la délivrance par la piété du service, et Ezra avait promis la prospérité par adhésion à la foi. Malgré tout cela, les Juifs se traînaient dans la servitude, et leur délivrance était différée. Daniel présenta alors le drame de la crise imminente -- le bris de la grande statue et l'établissement immédiat du règne perpétuel de la droiture, le royaume messianique.

  (1) Isaïe VI-11.

Tous ces faux espoirs amenèrent les Juifs à un tel degré de déception et de frustration raciale que leurs chefs se troublèrent au point de ne pas accepter et de ne pas reconnaître la mission et le ministère d'un divin Fils du Paradis lorsqu'il vint bientôt vers eux dans la similitude d'une chair mortelle -- incarné en tant que Fils de l'Homme.

Toutes les religions modernes ont commis de sérieuses bévues en essayant d'interpréter miraculeusement certaines époques de l'histoire. Il est vrai que Dieu a maintes fois tendu une main maternelle en intervenant providentiellement dans la marche des affaires humaines, mais il est faux de considérer des dogmes théologiques et des superstitions religieuses comme une sédimentation surnaturelle apparaissant par une action miraculeuse dans le cours de l'histoire. Le fait que les « très Hauts gouvernent le royaume des hommes » ne convertit pas l'histoire laïque en une histoire soi-disant sainte.

Des auteurs du Nouveau Testament et des écrivains chrétiens ultérieurs compliquèrent encore la déformation de l'histoire hébraïque par leurs tentatives bien intentionnées pour présenter les prophètes juifs comme transcendants. L'histoire hébraïque fut ainsi exploitée désastreusement par des écrivains tant juifs que chrétiens. L'histoire laïque des Hébreux a été complètement dogmatisée. Elle a été convertie en une fiction d'histoire sainte et elle est devenue inextricablement liée aux conceptions morales et aux enseignements religieux des nations dites chrétiennes.

Un bref exposé des points saillants de l'histoire hébraïque illustrera comment les faits contenus dans les archives furent déformés à Babylone par les prêtres juifs, au point de transformer l'histoire laïque quotidienne de leur peuple en une histoire fictive et prétendue sainte.

9. -- L'HISTOIRE DES HÉBREUX

Il n'y eut jamais douze tribus d'Israélites -- mais seulement trois ou quatre tribus établies en Palestine. La nation hébraïque prit corps par suite de l'union des soi-disant Israélites et des Cananéens. « Et les enfants d'Israël habitèrent parmi les Cananéens (1). Et ils prirent leurs filles pour femmes et donnèrent leurs filles aux fils des Cananéens ». Les Hébreux ne chassèrent jamais les Cananéens de Palestine, en dépit des chroniques établies à ce sujet par les prêtres qui affirmèrent sans hésiter cette expulsion.

  (1) Juges III-5.

La conscience israélienne prit origine dans la contrée montagneuse d'Ephraïm; la conscience juive ultérieure naquit dans le clan méridional de Juda. Les Juifs (les Judaïtes) cherchèrent toujours à diffamer et à noircir l'histoire des Israélites du nord (les Éphraïmites).

La prétentieuse histoire des Hébreux commence avec Saül ralliant les clans du nord pour résister à une attaque des Ammonites contre les hommes d'une tribu semblable -- les Giléadites -- à l'est du Jourdain. Avec une armée d'un peu plus de trois mille hommes il vainquit l'ennemi, et ce fut cet exploit qui amena les tribus des montagnes à en faire leur roi. Lorsque les prêtres exilés récrivirent cette histoire, ils élevèrent à 330.000 le nombre des soldats de Saül et ajoutèrent « Juda » à la liste des tribus ayant participé à la bataille.

Immédiatement après la défaite des Ammonites, Saül devint roi par une élection populaire de ses troupes. Nul prêtre ou prophète ne participa à cette affaire. Mais les prêtres inscrivirent plus tard dans les chroniques que Saül avait été couronné roi par Samuel conformément à des ordres divins (2). Ils agirent ainsi afin d'établir une « ligne divine de descendance » pour le royaume Judaïte de David.

  (2) I Samuel X-1.

Parmi les altérations de l'histoire juive, la plus grande concerne David. Après la victoire de Saül sur les Ammonites (victoire qu'il attribua à Jéhovah) les Philistins s'alarmèrent et commencèrent à attaquer les clans du nord, David et Saül ne purent jamais s'entendre. David, avec six cents hommes, conclut une alliance avec les Philistins et remonta la côte jusqu'à Esdraélon. À Gath, les Philistins ordonnèrent à David de quitter le champ de bataille. Ils craignaient qu'il ne se rallie à Saül. David se retira; les Philistins attaquèrent et battirent Saül. Ils n'y seraient jamais parvenus si David avait été fidèle à Israël. L'armée de David était un assemblage polyglotte de mécontents, composé en majeure partie d'inadaptés sociaux et de délinquants fuyant la justice.

La défaite tragique de Saül à Gilboa par les Philistins déprécia beaucoup Jéhovah aux yeux des Cananéens du voisinage. Ordinairement, la défaite de Saül aurait été attribuée à une apostasie envers Jéhovah, mais cette fois-ci les éditeurs Judaïtes l'attribuèrent à des erreurs de rituel. Ils avaient besoin de la tradition de Saül et de Samuel comme arrière-plan pour le règne de David.

David, avec sa petite armée, établit son quartier général à Hébron, ville non hébraïque. Ses compatriotes ne tardèrent pas à le proclamer roi du royaume de Juda. Juda était principalement composé d'éléments non Hébreux -- Kénites, Calébites, Jébusites, et autres Cananéens. Ils étaient des nomades -- des pâtres -- donc partisans de l'idée hébraïque sur la propriété collective de la terre. Ils étaient attachés aux idéologies des clans du désert.

La différence entre l'histoire sainte et l'histoire profane est bien illustrée par les deux récits différents concernant le couronnement de David comme roi, tels qu'on les trouve dans l'Ancien Testament. Une partie de l'histoire profane sur la manière dont ses partisans immédiats (son armée) le nommèrent roi fut laissée par inadvertance dans les archives par les prêtres qui préparèrent ultérieurement la longue et prosaïque version de l'histoire sainte. Celle-ci décrit comment, par gouverne divine, le prophète Samuel choisit David parmi ses compagnons et procéda ensuite officiellement, par des cérémonies compliquées et solennelles, à son onction comme roi des Hébreux, puis à sa proclamation comme successeur de Saül.

C'est ainsi que bien des fois, après avoir réparé leurs récits fictifs des interventions miraculeuses de Dieu auprès d'Israël, les prêtres omirent de détruire complètement les données claires et positive déjà incluses dans les Chroniques.

David chercha à se créer une situation politique en épousant d'abord la fille de Saül, puis la veuve de Nabal, le riche Édomite, et ensuite la fille de Talmaï, roi de Guerschur. Il prit six épouses parmi les femmes de Jébus, sans compter Bethsabée, la femme du Hittite.

Ce fut par ces méthodes et avec ces méthodes et avec ces personnages que David élabora la fiction un divin royaume de Juda, succédant à héritage et aux traditions du royaume du nord formé par l'Israël d'Ephraïm, alors en voie de disparition. La tribu cosmopolite de David, dite de Juda, se composait de plus de Gentils que de Juifs; les aînés d'Ephraïm, bien qu'opprimés descendirent cependant de leur montagnes et « l'oignirent roi d'Israël ». Après une menace militaire, David fit un pacte avec les Jébusites et installa la capitale du royaume uni à Jébus (Jérusalem), qui était une ville bien fortifiée à mi-chemin entre Juda et Israël. Les Philistins en furent irrités et ne tardèrent pas à attaquer David. Après une farouche bataille, ils furent vaincus, et Jéhovah fut établi une fois de plus en tant que « Dieu, l'Éternel des Armées ».

Mais il fallait à tout prix que Jéhovah partageât une partie de sa gloire avec les Dieux cananéens, car le gros de l'armée de David n'était pas hébreu. C'est pourquoi l'on voit apparaître dans vos Écritures une indication révélatrice à laquelle les éditeurs judaïtes ne prêtèrent pas attention: «Jéhovah a fait une brèche au milieu de mes ennemis devant moi; c'est pourquoi il appela le nom de ce lieu Baal Pératsim »(1). Cela eut lieu parce que quatre-vingts pour cent des soldats de David étaient des Baalites.

  (1) Le Baal des Brèches, 2 Samuel V-20.

David expliqua la défaite de Saül à Gilboa en faisant remarquer que Saül avait attaqué une ville cananéenne, Gilboa, dont la population avait un traité de paix avec les Éphraïmites. C'est pourquoi Dieu l'avait abandonné. Même du temps de Saül, David avait défendu la ville cananéenne de Kella contre les Philistins, puis choisi pour capitale une ville cananéenne. Fidèle à sa politique de compromis avec les Cananéens, David remit sept descendants de Saül aux Gibéonites pour être pendus.

Après la défaite des Philistins, David prit possession de « l'arche de l'Éternel », l'amena à Jérusalem, et rendit officiel le culte de Jéhovah dans son royaume. Il imposa ensuite un lourd tribut aux peuplades environnantes -- les Édomites, les Moaabites, les Ammonites, et les Syriens.

Le comité politique corrompu du parti de David commença à prendre personnellement possession de terres dans le nord, en violation des moeurs hébraïques, et s'empara bientôt des taxes sur les caravanes, précédemment perçues par les Philistins. Vint ensuite une série d'atrocités culminant dans le meurtre d'Urie. Tous les appels judiciaires étaient jugés à Jérusalem; «les anciens » ne pouvaient plus rendre justice. Naturellement, la rébellion éclata. Aujourd'hui, on qualifierait Absalon de démagogue; sa mère était une Cananéenne. Il y avait une demi-douzaine de prétendants au trône en dehors de Salomon, le fils de Bethsabée.

Après la mort de David, Salomon expurgea l'organisation politique de toute influence nordique, mais n'abandonna rien de la tyrannie et de la taxation du régime de son père. Salomon ruina la nation par les prodigalités de sa cour et par son programme compliqué de constructions comprenant la maison du Liban, le palais de la fille du pharaon, le temple de Jéhovah, le palais du roi, et la restauration des murs de nombreuses villes. Il avait près de mille femmes dans son harem.

À cette époque, le temple de Jéhovah à Siloé tomba en discrédit, et tout le culte de la nation fut concentré à Jébus, dans la fastueuse chapelle royale. Le royaume du nord se tourna davantage vers l'adoration d'Elohim. Il bénéficiait de la faveur du Pharaon qui asservit ultérieurement Juda en soumettant le royaume du sud au tribut.

Il y eut des hauts et des bas -- des guerres entre Israël et Juda. Après quatre années de guerre civile et trois dynasties Israël tomba sous la coupe de despotes citadins qui commencèrent à faire commerce des terres. Le roi Omri essaya même d'acquérir Shémer (2). Mais la fin approcha rapidement lorsque Salmanasar Il décida de contrôler la côte méditerranéenne (3). Achab, roi d'Ephraïm, rassembla dix autres groupes et résista à Karkar; la bataille resta indécise. L'avance de l'Asyrien fut arrêtée, mais les alliés furent décimés. Cette bataille n'est même pas mentionnée dans l'Ancien Testament.

De nouvelles difficultés apparurent quand le roi Acbab essaya d'acheter des terres à Naboth. Jézabel, sa femme phénicienne, imita la signature d'Achab sur les documents ordonnant la confiscation de la terre de Naboth accusé d'avoir blasphémé les noms « d'Elohim et du roi ». Naboth et ses fils furent rapidement mis à mort (4). L'énergique Élie apparut sur la scène,.accusant Acliab du meurtre des Naboth. C'est ainsi qu'Élie, l'un des plus grands prophètes, commença son enseignement comme défenseur des anciennes moeurs concernant les terres, en opposition avec le comportement des Baalim vendeurs de terres et avec la tentative des villes pour dominer le pays. Mais la réforme n'aboutit pas avant le moment où un grand propriétaire terrien, Jéhu, joignit ses forces à celles du roitelet nomade Jonadab pour détruire les prophètes (agents immobiliers) de Baal à Samarie (5).

  (2) Schémer ou la Samarie, I Rois XVI-24.
  (3) 2 Rois XVIII-9.
  (4) 1 Rois XXI.
  (5) 2 Rois X.

Un regain de vie apparut lorsque Joas et son fils Jéroboam délivrèrent Israël de ses ennemis (6). Mais à cette époque la Samarie était gouvernée par une féodalité de brigands dont les déprédations rivalisaient avec celles de l'ancienne dynastie de David. L'État et l'Église coopéraient étroitement. Leurs tentatives pour supprimer la liberté de parole conduisirent Élie, Amos, et Osée à écrire en secret, et ce fut le véritable commencement des Bibles juive et chrétienne.

  (6) 2 Rois XIV-23.

Le royaume du nord ne fut pas effacé de l'histoire avant le moment où le roi d'Israël conspira avec le roi d'Égypte et refusa de continuer à payer tribut a l'Assyrie. Alors commença un siège de trois ans suivi par la dispersion totale des populations du nord. Ephraïm (Israël) disparut ainsi. Juda -- les Juifs, le « reste d'Israël » -- avait commencé à concentrer les terres entre les mains d'un petit nombre, « accumulant maison après maison et champ après champ » comme disait Isaïe. Il y eut bientôt à Jérusalem un temple de Baal à côté du temple de Jéhovah. Ce règne de la terreur se termina par une révolte monothéiste conduite par le tout jeune roi Joas qui fit ensuite croisade pendant trente-cinq ans en faveur de Jéhovah.

Amatsia, le roi suivant, eut des difficultés avec les contribuables édomites en révolte et avec leurs voisins. Après une victoire éclatante, il se mit à attaquer ses voisins du nord et subit une défaite tout aussi retentissante. Ensuite les paysans se révoltèrent; ils assassinèrent le roi et mirent sur le trône son fils de seize ans Azaria (7) appels Uzza par Isaïe. Après Uzza, les choses allèrent de mal en pis, et Juda vécut pendant cent ans en payant tribut aux rois d'Assyrie. Le premier Isaïe leur dit que Jérusalem, étant la ville de Jéhovah, ne tomberait jamais, mais Jérémie n'hésita pas à proclamer sa chute.

  (7) 2 Rois XIV-19 et XV-1.

La véritable ruine de Juda fut amenée par une bande de riches politiciens corrompus, sous le gouvernement du roi-enfant Manassé. L'économie changeante favorisa le retour à l'adoration de Baal, dont les opérations immobilières privées sur les terres étaient contraires à l'idéologie de Jéhovah. La chute de l'Assyrie et l'ascendant de l'Égypte amenèrent pour un temps la délivrance de Juda, et les paysans prirent le pouvoir. Sous Josias, ils détruisirent la horde des politiciens corrompus de Jérusalem.

Cette ère prit fin tragiquement lorsque Josias prétendit sortir pour intercepter la puissante armée du pharaon Nécho qui remontait la côte en venant d'Égypte pour aider l'Assyrie contre Babylone. Josias fut balayé, et Juda dut payer tribut à l'Égypte. Le parti politique de Baal revint au pouvoir à Jérusalem, et c'est alors que commença la véritable servitude égyptienne. Vint ensuite une période au cours de laquelle les politiciens de Baal contrôlèrent à la fois les tribunaux et la prêtrise. L'adoration de Baal était un système économique et social concernant les droits de propriété ainsi que la fertilité du sol.

Lorsque Nébucadnetsar renversa Nécho, Juda tomba sous la suzeraineté de Babylone et reçut dix ans de grâce, mais ne tarda pas a se révolter. Nébucadnetsar l'attaqua. Les Judaïtes inaugurèrent alors des réformes sociales, telles que l'affranchissement des esclaves, pour influencer Jéhovah. L'armée babylonienne se retira temporairement, et les Hébreux se réjouirent de ce que la vertu magique de leur réforme les eût délivrés. Ce fut durant cette période que Jérémie leur annonça le sort fatal qui les attendait, et bientôt Nébucadnetsar revint.

La fin de Juda survint alors soudainement. Sa capitale fut détruite et le peuple emmené à Babylone. La lutte Jéhovah-Baal se termina par la captivité, et le contrecoup de la captivité ramena le reste d'Israël au monothéisme.

À Babylone, les Juifs arrivèrent à la conclusion qu'ils ne pouvaient subsister en Palestine en tant que petit groupe ayant ses propres coutumes économiques et sociales, et que si leurs idéologies devaient prévaloir, il leur fallait convertir les Gentils. C'est ainsi que prit naissance leur nouveau concept de la destinée -- l'idée que les Juifs devaient être les serviteurs élus de Jéhovah. La religion juive de l'Ancien Testament accomplit réellement son évolution à Babylone durant la captivité.

La doctrine de l'immortalité prit également forme à Babylone. Les Juifs avaient cru que l'idée de la vie future détournait l'attention de leur évangile de justice sociale. Maintenant, pour la première fois, la théologie remplaçait la sociologie et l'économie. La religion prenait corps en tant que système de pensée et de conduite de plus en plus séparé de la politique, de la sociologie, et de l'économie.

C'est ainsi que la vérité au sujet du peuple juif révèle que bien des événements considérés comme appartenant à l'histoire sainte, ne représentent guère plus que la chronique de l'histoire profane ordinaire. Le Judaïsme fut le terrain dans lequel grandit le Christianisme, mais les Juifs ne furent pas un peuple miraculeux.

10. -- LA RELIGION HÉBRAÏQUE

Leurs chefs avaient enseigné aux Israélites qu'ils étaient un peuple élu, non à cause d'une indulgence et d'un monopole spéciaux de la faveur divine, mais à cause de leur mission particulière d'apporter à toutes les nations la vérité d'un Dieu unique et suprême. Ils avaient promis aux Juifs que, s'ils accomplissaient cette destinée, ils deviendraient les dirigeants spirituels de tous les peuples, et que le Messie attendu régnerait sur eux et sur le monde entier comme Prince de la Paix.

Quand les Juifs eurent été libérés par les Persans, ils ne revinrent en Palestine que leur pour retomber sous la servitude de leurs propres prêtres, avec leur code de lois, de sacrifices, et de rituels. De même que les clans hébreux avaient rejeté la merveilleuse histoire de Dieu présentée dans le discours d'adieu de Moïse sur les rites de sacrifice et de pénitence, de même ces restes de la nation hébraïque rejetèrent la magnifique conception du second Isaïe sur les lois, les règles, et les rites de leur nation grandissante.

L'égoïsme national, la fausse confiance en un Messie promis et mal compris, ainsi que la servitude et la tyrannie croissante de la prêtrise, réduisirent définitivement au silence les voix des dirigeants spirituels (sauf Daniel, Ezéchiel, Aggée, et Malachie). Depuis cette époque jusqu'à celle de Jean le Baptiste, tout Israël subit une régression spirituelle constante. Toutefois, les Juifs ne perdirent jamais le concept du Père Universel; même jusqu'au XXième siècle après le Christ, ils maintinrent cette conception de la Déité.

Depuis Moïse jusqu'à Jean le Baptiste étend une ligné ininterrompue d'éducateurs fidèles qui transmirent de génération en génération le flambeau de la lumière monothéiste, tandis qu'ils réprimandaient sans cesse les chefs sans scrupules, dénonçaient les prêtres faisant commerce, et exhortaient toujours les populations à se rallier à l'adoration du suprême Jéhovah, le Seigneur Dieu d'Israël.

En tant que nation, les Juifs finirent par perdre leur identité politique, mais la religion hébraïque de croyance sincère en un lieu unique et universel continue à vivre dans le coeur des exilés dispersés. Cette religion survit parce quelle a efficacement fonctionné pour conserver les plus hautes valeurs de ses partisans. La religion juive a bien réussi à préserver les idéaux d'un peuple, mais non à entretenir le progrès et à encourager la découverte philosophique créative dans le domaine de la vérité. La religion juive avait beaucoup de défauts -- elle était déficiente en philosophie et à peu près dépourvue de qualités esthétiques  -- mais elle conserve les valeurs morales, et c'est pourquoi elle subsista. Comparé avec d'autres concepts de la Déité, le suprême Jéhovah était bien clair, vivant, personnel, et moral.

Les Juifs aimaient la justice, la sagesse, la vérité, et la droiture comme peu de peuples l'on fait, mais ils ont moins contribué que tous les autres peuples à la compréhension intellectuelle et spirituelle de ces qualités. Bien que la théologie hébraïque ait refusé de s'amplifier, elle a joué un rôle important dans le développement de deux autres religions mondiales, le christianisme et le mahométisme.

La religion juive persista aussi à cause de ses institutions. Il est difficile à une religion de survivre en tant que pratique personnelle d'individus isolés. Les chefs religieux ont toujours commis l'erreur suivante: apercevant les maux de la religion institutionnelle, ils cherchent à détruire la technique de son fonctionnement collectif. Au lieu de détruire tout le rituel, ils feraient mieux de le réformer. Sous ce rapport, Ézéchielfut plus sage que ses contemporains. Il se joignit a eux pour insister sur la responsabilité morale personnelle, mais il entreprit aussi d'établir l'observance fidèle d'un rituel, supérieur et purifié.

C'est ainsi que les éducateurs successifs d'Israël effectuèrent dans l'évolution religieuse le plus grand accomplissement qui ait eu lieu sur Urantia: la transformation graduelle, mais continue, du concept barbare du sauvage démon Jéhovah, le jaloux et cruel dieu-esprit du fulminant volcan du Sinaï, en un concept ultérieur, exalté et céleste, du Jéhovah suprême, créateur de toutes choses et Père miséricordieux de toute l'humanité. Ce concept hébraïque de Dieu fut l'évocation humaine la plus élevée du Père Universel jusqu'au moment où il fut encore élargi et amplifié avec un charme extrême par les enseignements personnels et l'exemple de la vie de son Fils, Micaël de Nébadon.

 

[Présenté par un Melchizédek de Nébadon.]

 

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