L'AJUSTEUR ET L'ÂME
LA présence de l'Ajusteur divin dans la pensée humaine rend
perpétuellement impossible à la science ou à la philosophie d'atteindre
une compréhension satisfaisante de l'âme évoluante de la personnalité
intéressée. L'âme morontielle est fille de l'univers, et l'on ne peut
réellement la connaître que par clairvoyance cosmique et par découverte
spirituelle.
Le concept d'une âme et d'un esprit qui l'habite n'est pas nouveau sur
Urantia. Il a fréquemment apparu dans les divers systèmes de croyances
planétaires. Beaucoup de sectes orientales et quelques sectes occidentales
ont perçu que l'homme est divin par héritage en même temps qu'humain par
hérédité. Le sentiment de la présence intérieure ajouté à l'omniprésence
extérieure de la Déité a longtemps fait partie de bien des religions
urantiennes. Les hommes ont longtemps cru à l'existence d'un facteur qui
grandit à l'intérieur de la nature humaine, un élément vital destiné à
durer au delà du bref espace d'une vie temporelle.
Avant que les hommes ne se soient rendu compte que leur âme évoluante
était engendrée par un esprit divin, ils ont cru qu'elle résidait dans
divers organes physiques -- l'oeil, le foie, les reins, le coeur, et plus
tard le cerveau. Les sauvages associaient l'âme au sang, à la respiration,
aux ombres, et à leur image réfléchie dans l'eau.
Dans leur conception de l'atman, les instructeurs hindous
arrivèrent réellement à une estimation approximative de la nature et de la
présence de l'Ajusteur, mais ils ne réussirent pas à distinguer la
présence concomitante de l'âme évoluante et potentiellement immortelle.
Les Chinois reconnurent cependant deux aspects d'un être humain, le
yang et le yin, l'âme et l'esprit. Les Égyptien et beaucoup de
tribus africaines croyaient aussi à deux facteurs, le ka et le
ba; ils ne croyaient généralement pas que l'âme fût préexistante, mais
seulement l'esprit.
Les habitants de la vallée du Nil croyaient que chaque individu
favorisé se voyait attribuer à sa naissance, ou peu après, un esprit
protecteur qu'ils appelaient le ka. Ils enseignaient que cet esprit
gardien restait avec le sujet mortel pendant toute sa vie et passait avant
lui a l'état futur. Sur les murs d'un temple de Louxor, où se trouve
décrite la naissance d'Amenhotep III, le petit prince est dépeint sur le
bras du dieu du Nil, et auprès de lui se trouve un autre enfant,
apparemment identique au prince, qui symbolise l'entité que les Égyptien
appelaient le ka. Cette sculpture fut achevée au quinzième siècle avant
J.-C.
On croyait que le ka était un génie spirituel supérieur qui désirait
guider dans les meilleures voies de la vie temporelle l'âme humaine
associée, mais surtout influencer la prospérité du sujet dans l'au-delà.
Quant un Égyptien de cette période mourait, on escomptait que son ka
l'attendrait de l'autre côte du grand Fleuve. Tout d'abord on supposa que
seuls les rois possédaient un ka, mais on ne tarda pas a croire que tous
les hommes justes en avaient un. Parlant du ka intérieur de son coeur, un
chef égyptien a dit: « Je n'ai pas négligé ses paroles, j'ai craint de
transgresser ses directives. Cela m'a fait prospérer grandement. J'ai
réussi grâce a ce qu'il m'a fait faire. J'ai été distingué par sa gouverne
». Beaucoup d'Égyptien croyaient que le ka était un oracle de Dieu en
chacun, et qu'ils allaient « passer une éternité avec un coeur joyeux dans
les faveurs du Dieu qui est en vous ».
Toutes les races évoluantes d'Urantia ont un mot équivalent au concept
de l'âme. Beaucoup de peuplades primitives croyaient que l'âme jetait des
regards au dehors sur le monde à travers les yeux humains; c'est pourquoi
elles craignaient avec une peur si enfantine la malveillance du mauvais
oeil. Elles ont longtemps cru que « l'esprit de l'homme est dans la lampe
du Seigneur ». Le Rig-Véda dit: « Ma pensée parle à mon coeur ».
1. -- LE CADRE MENTAL DU CHOIX
Bien que les Ajusteurs aient à effectuer un travail de nature
spirituelle, ils sont obligés de l'exécuter tout entier sur des bases
mentales. La pensée est le terrain humain à partir duquel le Moniteur
divin doit faire apparaître par évolution l'âme morontielle, avec la
coopération de la personnalité qu'il habite.
Il existe une unité cosmique dans les divers niveaux mentaux de
l'univers des univers. L'origine des egos intellectuels se trouve dans la
pensée cosmique d'une manière très homologue à l'origine des nébuleuses
dans les énergies cosmiques de l'espace universel. Sur le niveau humain
(donc personnel) des egos intellectuels, le potentiel spirituel
d'évolution devient dominant si la pensée y consent, à cause de la
dotation spirituelle de la personnalité humaine associée à la présence
créative, chez ces egos, d'un foyer-entité ayant une valeur absolue.
Toutefois, cette domination de la pensée matérielle par l'esprit est
subordonnée à deux expériences: d'une part il faut que la pensée ait
évolué par le ministère des sept esprits-mentaux adjuvats, et d'autre part
il faut que l'ego matériel (personnel) choisisse de coopérer avec
l'Ajusteur intérieur pour créer et entretenir l'ego morontiel, l'âme
évolutionnaire potentiellement immortelle.
La pensée matérielle est le cadre dans lequel les personnalités
humaines vivent, sont conscientes d'elles-mêmes, prennent des décisions,
choisissent ou abandonnent Dieu, se rendent éternelles ou se détruisent
elles-mêmes.
L'évolution matérielle vous a procuré une machine vivante, votre corps.
Le Père lui-même vous a doté de la réalité spirituelle la plus pure que
l'on connaisse dans l'univers, votre Ajusteur de Pensée. Mais la pensée a
été remise entre vos mains, elle est sujette à vos propres décisions, et
c'est par la pensée que vous vivez ou mourez. C'est à l'intérieur de la
pensée et avec elle que vous prenez les décisions morales qui vous
permettent de devenir semblables à l'Ajusteur, c'est-à-dire semblables à
Dieu.
La pensée terrestre est un système mental temporaire prêté aux êtres
humains sur la durée d'une vie matérielle. Selon la manière dont ils
l'emploient, ils acceptent ou rejettent le potentiel d'existence
éternelle. La pensée est à peu près la seule fraction de réalité
universelle que vous possédiez et qui soit soumise à votre volonté. L'âme
-- l'ego morontiel -- dépeindra fidèlement l'accumulation des décisions
temporelles que l'ego mortel aura prises. La conscience humaine repose
doucement sur le mécanisme électro-chimique sous-jacent, et touche
délicatement le système énergétique morontiel-spirituel qui la domine. Au
cours de sa vie terrestre, l'être humain n'est jamais complètement
conscient d'aucun de ces deux systèmes, et c'est pourquoi il lui faut
travailler dans la pensée, dont il est conscient. Ce qui assure la survie
n'est pas tellement ce, que la pensée comprend mais plutôt ce qu'elle
cherche à comprendre. Ce qui l'identifie avec l'esprit n'est pas tellement
ce à quoi elle ressemble, mais ce à quoi elle s'efforce de ressembler. Ce
n'est pas tant le fait pour l'homme d'être conscient de Dieu qui se
traduit par son ascension de l'univers, mais plutôt son désir ardent de
rencontrer Dieu. Ce que vous êtes aujourd'hui n'est pas aussi important
que ce que vous devenez jour après jour et d'ans l'éternité.
La pensée est l'instrument cosmique sur lequel la volonté humaine peut
jouer les dissonances de la destruction ou faire résonner les délicates
mélodies de l'identification avec Dieu et de la survie éternelle qui en
résulte. L'Ajusteur attribué à l'homme est en dernière analyse imperméable
au mal et incapable de pécher, mais la pensée humaine peut être dénaturée,
déformée, et rendue laide et mauvaise par les machinations coupables d'une
volonté humaine égoïste et perverse. De même, cette pensée peut être
rendue noble, belle, et vraie, et bonne -- effectivement grande -- en
s'accordant avec la volonté spirituellement éclairée d'un être humain
connaissant Dieu.
La pensée évolutionnaire n'est pleinement stable et digne de confiance
qu'en se manifestant aux deux extrémités de l'intellectualité cosmique --
totalement mécanisée ou entièrement spiritualisée. Entre les deux extrêmes
mentaux du pur contrôle machinal et de la vraie nature spirituelle se
situe l'immense groupe des penseurs évoluants et ascendants, dont la
stabilité et la tranquillité dépendent du choix fait par leur personnalité
et de leur identification avec l'esprit.
Toutefois, l'homme n'abandonne pas servilement et passivement sa pensée
à l'Ajusteur. Il choisit plutôt de suivre activement, positivement, et
coopérativement les directives de l'Ajusteur, quand il a conscience
qu'elles diffèrent des désirs et des impulsions de sa pensée humaine
naturelle. Les Ajusteurs manipulent la pensée de l'homme, mais ne la
dominent jamais contrairement à sa volonté. Pour les Ajusteurs, la volonté
de l'homme est suprême. C'est ainsi qu'ils la considèrent et la
respectent, tandis qu'ils s'efforcent d'atteindre les buts spirituels
d'ajustement de la pensée et de transformation du caractère dans le cadre
à peu près illimité de la pensée humaine en évolution.
La pensée est votre navire, l'Ajusteur est votre pilote, la volonté
humaine est le capitaine. Le maître du vaisseau humain devrait avoir la
sagesse de se fier au divin pilote pour conduire l'âme ascendante dans les
havres morontiels de la survie éternelle. Seuls l'égoïsme, la paresse, et
la culpabilité permettent à la volonté de l'homme de rejeter la gouverne
de ce pilote aimant, et de naufrager finalement la carrière humaine sur
les dangereux écueils du refus de la miséricorde et sur les récifs de la
pratique du péché. Avec votre consentement, le fidèle pilote vous fera
traverser en sécurité les obstacles du temps et les handicaps de l'espace,
pour atteindre la source de la pensée divine et aller même au delà
jusqu'au Père des Ajusteurs au Paradis.
2. -- NATURE DE L'ÂME
Dans toutes les fonctions mentales de l'intelligence cosmique, la
totalité de la pensée domine les opérations intellectuelles
fractionnaires. Dans son essence, la pensée est une unité fonctionnelle,
et c'est pourquoi elle ne manque jamais de manifester cette unité
constitutive, même quand elle est gênée et entravée par les choix et les
actes malavisés d'un ego abusé. Cette unité de pensée cherche
invariablement à se coordonner avec l'esprit sur tous les niveaux de son
association avec un ego ayant dignité volitive et prérogatives
d'ascension.
La pensée matérielle des hommes est le métier universel qui porte le
tissu cosmique sur lequel l'Ajusteur de Pensée intérieur brode les
archétypes spirituels d'un caractère universel possesseur de valeurs
durables et de significations cosmiques -- une âme survivante à destinée
ultime et à carrière sans fin, un finalitaire potentiel.
Une personnalité humaine s'identifie par sa pensée et son esprit
maintenus en rapport fonctionnel par la vie dans un corps matériel. Les
relations actives entre cette pensée et cet esprit n'ont pas pour résultat
une combinaison des qualités ou attributs mentaux et spirituels, mais
plutôt une valeur universelle entièrement nouvelle, originale, et unique,
ayant un potentiel de durée éternelle, l'âme.
La création de cette âme immortelle résulte de trois facteurs, et non
de deux. Ces trois antécédents de l'âme morontielle humaine sont les
suivants:
1. La pensée humaine et toutes les influences
cosmiques qui la précèdent et qui agissent sur elle.
2. L'esprit divin qui habite cette pensée humaine
et tous les potentiels inhérents à ce fragment de spiritualité absolue,
ainsi que tous les facteurs et influences spirituels qui lui sont associés
dans la vie humaine.
3. Les relations entre la pensée matérielle et l'esprit
divin, qui dénotent une valeur et comportent une signification ne se
trouvant dans aucun des deux facteurs de cette association. La réalité de
cette relation unique n'est ni matérielle ni spirituelle, mais morontielle.
C'est l'âme.
Les médians ont depuis longtemps appelé pensée médiane cette âme
évoluante de l'homme, par contraste avec la pensée inférieure ou
matérielle et la pensée supérieure ou cosmique. La pensée médiane est en
réalité un phénomène morontiel, puisqu'elle existe dans le domaine
intermédiaire entre le matériel et le spirituel. Le potentiel de cette
évolution morontielle est inhérent aux deux besoins universels de la
pensée: l'impulsion de la pensée finie de la créature pour connaître Dieu
et rejoindre la divinité du Créateur, et l'impulsion de la pensée infinie
du Créateur pour connaître l'homme et aboutir à l'expérience de la
créature.
L'opération céleste faisant apparaître par évolution l'âme immortelle
est rendue possible parce que la pensée humaine est en premier lieu
personnelle, et en second lieu en contact avec des réalités super-animales.
L'âme possède une dotation. supra-matérielle de facultés cosmiques qui
assure l'évolution d'une nature morale capable de rendre des décisions
morales, ce qui produit un contact créatif de bonne foi avec les
ministères spirituels associés et avec l'Ajusteur de Pensée intérieur.
Le résultat inévitable de cette spiritualisation de la pensée humaine
par contact est la naissance graduelle d'une âme, émanation conjointe des
deux éléments suivants: premièrement une pensée issue des adjuvats,
dominée par une volonté humaine ardemment désireuse de connaître Dieu, et
travaillant en liaison avec les forces spirituelles de l'univers; et
deuxièmement un fragment effectif du Dieu même de toute la création -- le
Moniteur de Mystère -- qui contrôle ces forces spirituelles. C'est ainsi
que l'ego matériel et mortel transcende réellement les limitations
temporelles du mécanisme de la vie physique et atteint une nouvelle
expression et une nouvelle identification dans le véhicule évoluant qui
doit assurer la continuité de l'ego, l'âme morontielle et immortelle.
3. -- L'ÂME EN ÉVOLUTION
Les erreurs de la pensée et les dérèglements de la conduite humaine
peuvent notablement retarder l'évolution de l'âme. Toutefois, elles ne
sauraient inhiber ce phénomène morontiel une fois que l'âme a été
initialement formée par l'Ajusteur intérieur avec le consentement de la
volonté de la créature. Mais à tout moment antérieur à la mort physique,
la même volonté matérielle et humaine a le pouvoir de revenir sur son
choix et de rejeter la survie. Même après avoir survécu, le mortel
ascendant conserve la prérogative de choisir le rejet de la vie éternelle.
À tout moment avant la fusion avec l'Ajusteur, la créature évoluante et
ascendante peut décider de renoncer à suivre la volonté du Père céleste.
La fusion avec l'Ajusteur dénote que l'ascendeur a éternellement et
irrévocablement choisi de faire la volonté du Père.
Durant la vie incarnée, l'âme en évolution a la faculté de renforcer
les décisions supra-matérielles de la pensée humaine. Étant
supra-matérielle, l'âme ne fonctionne pas spontanément sur le niveau
matériel de l'expérience humaine. Sans la collaboration d'un esprit divin
tel que l'Ajusteur, cette âme sub-spirituelle ne peut pas non plus
fonctionner au-dessus du niveau morontiel. Enfin, l'âme ne prend pas de
décisions finales avant que la mort ou le transfert n'ait rompu son
association matérielle avec la pensée terrestre, à moins que le penseur
n'ait librement et volontairement délégué l'autorité nécessaire à son âme
morontielle fonctionnellement associée. Durant la vie incarnée, la volonté
humaine (le pouvoir personnel de prendre une décision) réside dans les
circuits mentaux matériels. Au fur et à mesure du développement humain sur
terre, l'ego, avec ses inestimables pouvoirs de choix, s'identifie de plus
en plus avec l'entité psycho-morontielle émergente. Après la mort et la
résurrection sur le monde des maisons, la personnalité humaine est
complètement identifiée avec l'ego morontiel. L'âme est donc l'embryon du
futur véhicule morontiel de l'identité de la personnalité.
L'âme immortelle a d'abord une nature entièrement morontielle, mais
elle possède une telle aptitude au développement qu'elle s'élève
invariablement aux vrais niveaux spirituels où prévaut la fusion avec
l'esprit de la Déité. Elle fusionne généralement avec le même esprit du
Père Universel qui avait déclenché ce phénomène créatif dans la pensée de
la créature.
La pensée humaine et l'Ajusteur divin sont tous deux conscients de la
présence et de la nature distincte de l'âme en évolution. L'Ajusteur l'est
pleinement, et le penseur partiellement. Quant à l'âme, au fur et à mesure
de sa propre croissance évolutionnaire, elle devient de plus en plus
consciente de la pensée humaine et de l'Ajusteur divin en tant
qu'identités associés. L'âme participe aux qualités de la pensée humaine
aussi bien qu'à celles de l'esprit divin, mais elle évolue constamment
vers un accroissement du contrôle spirituel et de la domination divine, en
développant une fonction mentale dont le sens cherche à se coordonner avec
les vraies valeurs spirituelles.
La carrière humaine, l'évolution de l'âme, n'est pas tant une épreuve
qu'une éducation. La foi dans la survie des valeurs suprêmes est l'essence
de la religion.
L'expérience religieuse authentique consiste à unir les valeurs
suprêmes et les significations cosmiques en un épanouissement de la
réalité universelle.
La pensée connaît les quantités, les manifestations, les
significations. Mais les qualités -- les valeurs -- sont ressenties.
L'organisme qui ressent est la création conjointe de la pensée qui connaît
et de l'esprit associé qui confère la réalité.
Dans la mesure où l'âme morontielle évoluante de l'homme s'imprègne de
vérité, de beauté, et de bonté en tant que valeurs incorporées de la
conscience divine, l'être résultant devient indestructible. À défaut de
survie des valeurs éternelles dans l'âme en évolution, l'existence humaine
est dépourvue de sens, et la vie elle-même est une tragique illusion. Mais
un dicton reste éternellement vrai: ce que vous avez commencé dans le
temps, vous l'achèverez surement dans l'éternité -- si cela mérite d'être
achevé.
4. -- LA VIE INTÉRIEURE
La récognition est le processus intellectuel consistant à faire cadrer
les impressions sensorielles reçues du monde extérieur avec les formules
mnémotechniques de l'intéressé. La compréhension implique que les
impressions sensorielles reconnues et les formules mnémotechniques
associées ont été intégrées ou organisées en un réseau dynamique de
principes.
Les significations dérivent d'une conjugaison de récognition et de
compréhension; elles n'existent pas dans un monde entièrement sensoriel ou
matériel. Les significations et les valeurs ne sont perçues que dans les
sphères intérieures ou supra-matérielles d'expérience humaine.
Les progrès de la vraie civilisation sont tous nés dans ce monde
intérieur de l'humanité. Seule la vie intérieure est vraiment créative. La
civilisation ne peut guère progresser quand la majorité de la jeunesse
d'une génération consacre son attention et son énergie à la poursuite
matérialiste du monde sensoriel ou extérieur.
Le monde intérieur et le monde extérieur ont des séries différentes de
valeurs. Toute civilisation est en péril quand les trois quarts de sa
jeunesse entrent dans des professions matérialistes et recherchent les
activités sensorielles du monde extérieur. La civilisation est en danger
quand la jeunesse cesse de s'intéresser à a morale, à la sociologie, à
l'eugénisme, à la philosophie, aux beaux-arts, à la religion, et à la
cosmogonie.
C'est seulement aux niveaux de la pensée superconsciente empiétant sur
le royaume spirituel de l'expérience humaine que l'on trouve ces concepts
supérieurs associés à des maîtres archétypes efficaces qui contribuent à
bâtir une civilisation meilleure et plus durable. La personnalité est
créative par nature, mais ne fonctionne créativement que dans la vie
intérieure de l'individu.
Les cristaux de neige ont toujours une forme hexagonale, mais jamais
deux d'entre eux ne sont identiques. Les enfants se modèlent sur des
types, mais il n'y en a pas deux qui soient identiques, même s'ils sont
jumeaux. Les personnalités s'apparentent à des types, mais sont toujours
uniques.
Le bonheur et la joie prennent origine dans la vie intérieure. On ne
peut ressentir tout seul une joie réelle. Une vie solitaire est fatale
pour le bonheur. Même les familles et les nations jouissent mieux de la
vie si elles la partagent avec d'autres.
On ne peut contrôler complètement le monde extérieur -- l'entourage.
C'est la créativité du monde intérieur qui est la plus sujette à vos
directives, parce que la personnalité y est largement délivrée des
entraves de la loi de cause et d'effet. Une souveraineté volitive limitée
est associée à la personnalité.
Dès lors que la vie intérieure de l'homme est vraiment créative, chaque
personne a la responsabilité de choisir si cette créativité sera spontanée
et entièrement dépendante du hasard, ou si elle sera contrôlée, dirigée,
et constructive. Comment une imagination créatrice peut-elle produire des
résultats valables si le stade où elle fonctionne est déjà préoccupé par
des préjugés, des haines, des rancunes, des revanches, et des sectarismes?
Les idées peuvent prendre leur origine dans les stimulants du monde
extérieur, mais les idéaux naissent seulement dans les royaumes créatifs
du monde intérieur. Les nations du monde sont actuellement dirigées par
des hommes qui ont une surabondance d'idées, mais une lamentable carence
d'idéaux. C'est l'explication de la pauvreté, des divorces, des guerres,
et des haines raciales.
Voici le problème: si l'homme avec son libre arbitre est intérieurement
doté de pouvoirs créatifs, il nous faut alors reconnaître que la libre
créativité contient le potentiel de la libre destructivité. Et quand la
créativité s'oriente vers le pouvoir destructeur, on se trouve en face des
dévastations du mal et du péché -- oppressions, guerres, et destructions.
Le mal est une créativité partielle qui tend vers la désintégration et la
destruction finale. Tout conflit est mauvais en ce sens qu'il inhibe la
fonction créative de la vie intérieure c'est une espèce de guerre civile
dans la personnalité
La créativité intérieure contribue à ennoblir le caractère par
intégration de la personnalité et unification de l'ego. Il est
éternellement vrai que le passé est inchangeable, et que seul l'avenir
peut être modifié par le ministère de la créativité de l'ego intérieur au
moment présent.
5. -- LA CONSÉCRATION DU CHOIX
En faisant la volonté de Dieu, ne créature ne fait rien de plus ni de
moins que de montrer son bon vouloir pour partager sa vie intérieure avec
Dieu -- le Dieu qui a rendu possible la vie de cette créature, avec ses
valeurs et ses significations intérieures. Le partage est digne de Dieu
divin. Dieu partage tout avec le Fils Éternel et l'Esprit Infini; et
ceux-ci à leur tour partagent tout avec les Fils divins et les Filles
spirituelles des univers.
L'imitation de Dieu est la clef de la perfection. Le secret de la
survie et de la perfection dans la survie est de faire sa volonté.
Les mortels vivent en Dieu, et Dieu a donc voulu vivre dans les
mortels. De même que les hommes se confient à lui, de même lui -- le
premier a confié une partie de lui-même aux hommes pour les accompagner.
Il a consenti à vivre dans les hommes et à habiter en eux en se soumettant
à la volonté humaine.
La paix dans la vie présente, la survie dans la mort, la perfection
dans la prochaine vie, le service dans l'éternité, tout cela est accompli
(en esprit) dès maintenant, si la personnalité créée consent à --
choisit de -- soumettre sa volonté à celle du Père. Quant au
Père, il a déjà choisi de subordonner un fragment de lui-même à la volonté
de la personnalité créée.
Ce choix de la créature n'est pas un abandon de sa volonté. Il est une
consécration, une expansion, une glorification, un perfectionnement de sa
volonté. Il élève la créature du niveau de signification temporelle à un
état supérieur où la personnalité du fils créé communie avec la volonté du
Père spirituel.
Le choix de faire la volonté du Père consiste pour le mortel à
découvrir le Père de l'esprit, même s'il faut que des âges s'écoulent
avant que le fils créé puisse effectivement se tenir en la présence réelle
de Dieu au Paradis. Ce choix ne consiste pas tant en une négation de la
volonté de la créature -- « que ce ne soit pas ma volonté mais la tienne
qui soit faite (1) » -- mais plutôt en une affirmation de la créature: «
c'est ma volonté que ta volonté soit faite ». Si ce choix
est décidé, le fils préférant Dieu aboutira tôt ou tard à l'union
intérieure (la fusion) avec le fragment de Dieu qui l'habite. Tout en se
perfectionnant, le même fils trouvera la satisfaction suprême de sa
personnalité dans une communion adoratrice entre la personnalité de
l'homme et celle de son Auteur, deux personnalités dont les attributs
créateurs se sont unis pour toujours dans une mutualité d'expression
librement voulue la naissance d'une nouvelle association éternelle entre
la volonté de l'homme et celle de Dieu.
(1) Luc XXII-42.
6. -- LE PARADOXE HUMAIN
Maintes difficultés des mortels proviennent de leur double relation
avec le cosmos. L'homme est une partie de la nature -- il existe dans la
nature -- et cependant il est capable de la transcender. L'homme est fini,
mais il est habité par une étincelle d'infinité. Cette situation double ne
fournit pas seulement un potentiel pour le mal, mais elle engendre aussi
de nombreuses situations sociales et morales empreintes de beaucoup
d'incertitudes et de soucis.
Le courage exigé pour triompher de la nature et pour se transcender
soi-même peut succomber devant les tentations de l'orgueil. La personne
capable de transcender son ego peut céder à la tentation de glorifier sa
conscience de soi. Le dilemme humain résulte du double fait que l'homme
est asservi à la nature et qu'en même temps il possède une liberté unique
-- la liberté de choix et d'action spirituels. Sur les niveaux matériels,
l'homme se trouve subordonné à la nature, tandis que sur les niveaux
spirituels, il triomphe de la nature et de tous les éléments temporels et
finis. Ce paradoxe est inséparable des tentations, du mal potentiel, et
des erreurs de décision; si ego devient altier et arrogant, le péché peut
apparaître.
Le monde fini ne pose par lui-même le problème du péché. Le fait d'être
fini n'est empreint ni de mal ni de péché. Le monde fini a été bâti par un
Créateur infini -- il est l'oeuvre de ses Fils divins -- et doit donc être
bon. Ce sont le mauvais usage, la déformation, et la perversion du
fini qui donnent naissance au mal et au péché.
L'esprit peut dominer la pensée; la pensée peu donc contrôler
l'énergie, mais elle ne peut le faire que par sa propre manipulation
intelligente des potentiels de métamorphose inhérents au niveau
mathématique des causes et effets dans le domaine physique, Le contrôle de
l'énergie n'est pas inhérent à la pensée de la créature; il est une
prérogative de la Déité, mais la pensée de la créature peut manipuler
l'énergie; elle y parvient dans la mesure exacte où elle est devenue
maîtresse des secrets de l'énergie de l'univers physique.
Quand l'homme souhaite modifier la réalité physique, soit en lui-même
soit dans son entourage, il y réussit dans la mesure où il a découvert les
voies et moyens de contrôler la matière et de diriger l'énergie. Sans
aide, la pensée est impuissante à influencer quoi que ce soit de matériel,
sauf son propre mécanisme physique auquel elle est inéluctablement liée.
Mais par l'emploi intelligent de son mécanisme corporel, la pensée peut
créer d'autres mécanismes, même des rapports d'énergie et des relations
vivantes, au moyen desquels cette pensée pourra de mieux en mieux
contrôler et même dominer son niveau physique dans l'univers.
L'expérience est la source des faits, et la pensée ne peut opérer
qu'avec eux. Dans l'édifice de la sagesse, les faits sont les pierres de
taille réunies par le ciment de l'expérience de la vie. L'homme peut
trouver l'amour de Dieu sans les faits et découvrir les lois de Dieu sans
amour, mais jamais il ne peut commencer à apprécier la symétrie infinie,
l'harmonie céleste, et l'exquise perfection de la nature totalement
inclusive de la Source-Centre Première avant d'avoir trouvé la loi divine
et l'amour divin, et de les avoir unifiés dans sa propre philosophie
cosmique en évolution.
L'expansion des connaissances matérielles permet une plus grande
appréciation intellectuelle de la signification des idées et de la valeur
des idéaux. Un être humain peut trouver la vérité dans son expérience
intérieure, mais il a besoin de connaître clairement les faits pour
appliquer sa découverte personnelle aux exigences brutalement pratiques de
la vie quotidienne.
Il est tout naturel que l'homme soit harcelé de sentiments d'insécurité
quand il se voit inextricablement lié à la nature, tout en possédant des
pouvoirs spirituels qui transcendent entièrement les choses temporelles et
finies. Seule la confiance religieuse -- la foi vivante -- peut soutenir
l'homme au milieu de ces problèmes difficiles et troublants.
Parmi les dangers qui assaillent la nature des hommes et mettent en
péril leur intégrité spirituelle, l'orgueil est le plus grand. Le courage
est plein de valeur, mais l'égoïsme est vaniteux et conduit au suicide
cosmique. Une confiance raisonnable en soi n'est pas à déplorer.
L'aptitude de l'homme à se transcender est ce qui le distingue du règne
animal.
L'orgueil est trompeur, grisant, et engendre le péché, que ce soit chez
un individu, un groupe, une race, ou une nation. Il est littéralement vrai
que « l'orgueil va au-devant de la ruine » (1).
(1) Et l'esprit hautain au devant de la
chute. Proverbes XVI-18.
7. -- LE PROBLÈME DE L'AJUSTEUR
L'incertitude dans la sécurité est l'essence de l'aventure du Paradis
-- incertitude dans le temps et la pensée, incertitude sur les événements
du déroulement de l'ascension au Paradis; sécurité en esprit et dans
l'éternité, sécurité dans la confiance sans réserve du fils créé en la
compassion divine et l'amour infini du Père Universel; incertitude en tant
que citoyen inexpérimenté de l'univers; sécurité en tant que fils
ascendant dans les demeures universelles d'un Père infiniment puissant,
sage, et aimant.
Puis-je vous recommander de prêter attention à l'écho lointain du
fidèle appel que l'Ajusteur adresse à votre âme? L'Ajusteur intérieur ne
peut ni arrêter ni même changer matériellement la lutte inhérente à votre
carrière dans le temps; il ne peut réduire les tribulations de votre vie
au cours de votre voyage en ce monde où l'on peine. L'habitant divin ne
peut que s'abstenir patiemment pendant que vous menez le combat de la vie
telle qu'elle est vécue sur votre planète. Par contre, au cours de vos
travaux et soucis, de vos luttes et de vos peines, vous pourriez, si
seulement vous le vouliez, permettre au vaillant Ajusteur de combattre
avec vous et pour vous. Vous pourriez ainsi être encouragé et inspiré,
passionné et intrigué, si vous vouliez seulement permettre à l'Ajusteur de
présenter constamment des images du vrai mobile, du but final, et de
l'éternel dessein de toute cette difficile lutte ascendante avec les
problèmes ordinaires de votre présent monde matériel.
Pourquoi n'aidez-vous pas l'Ajusteur qui cherche à vous montrer la
contrepartie spirituelle de tous ces efforts matériels opiniâtres?
Pourquoi ne permettez-vous pas à l'Ajusteur de vous fortifier à l'aide des
vérités spirituelles du pouvoir cosmique pendant que vous luttez contre
les difficultés temporelles de l'existence des créatures? Pourquoi
n'encouragez-vous pas l'assistant divin à vous réconforter en vous
montrant clairement le panorama éternel de la vie universelle pendant que
vous considérez avec perplexité les problèmes de l'heure qui passe?
Pourquoi refusez vous d'être éclairé et inspiré par le point de vue
universel pendant que vous peinez au milieu des handicaps du temps et que
vous vous débattez dans le dédale des incertitudes qui assaillent le
voyage de votre incarnation? Pourquoi ne pas permettre à l'Ajusteur de
spiritualiser vos méditations, même si vos pieds doivent fouler les
sentiers matériels des efforts terrestres?
Les races supérieures d'Urantia sont complètement mixtes. Elles sont un
mélange de nombreuses races et souches d'origines différentes. Cette
nature composite rend extrêmement difficile aux Moniteurs de travailler
efficacement durant la vie, et complique nettement les problèmes de
l'Ajusteur et de l'ange gardien après la mort. Il n'y a pas très longtemps
je me trouvais sur Salvington, et j'entendis un gardien de la destinée
présenter un exposé en règle pour atténuer les difficultés rencontrées
dans son ministère auprès de son sujet humain. Ce séraphin disait:
« Une grande partie de ma difficulté provenait de l'interminable
conflit entre les deux natures de mon sujet: la poussée de l'ambition
contrariée par l'indolence animale; les idéaux d'un peuple supérieur
barrés par les instincts d'une race inférieure; les desseins élevés d'une
grande pensée rencontrant l'antagonisme des besoins héréditaires
primitifs; les vues à long terme d'un Moniteur prévoyant contrecarrées par
l'étroitesse de vues d'une créature du temps; les plans modifié
progressifs d'un être ascendant modifiés par les désirs et les envies de
nature matérielle; les éclairs d'intelligence universelle annulés par les
impératifs énergétiques et chimiques d'une race en évolution; les
sentiments d'un animal s'opposant à la pression des anges; l'entraînement
d'un intellect annihilé par les tendances de l'instinct; l'expérience de
l'individu se heurtant aux penchants accumulés de la race; les buts des
meilleurs dominés par l'impulsion des pires; l'envoi du génie neutralisé
par le poids de la médiocrité; le progrès des bons retardé par l'inertie
des mauvais; l'art du beau souillé par la présence du mal; l'entrain de la
santé neutralisé par l'asthénie due à la maladie; la fontaine de foi
polluée par les poisons de la peur; la source de foie aigrie par les eaux
de l'affliction; l'allégresse de l'anticipation désillusionnée par
l'amertume de la réalisation; les joies de la vie toujours menacées par
les tristesses de la mort. Quelle vie, et sur quelle planète! Pourtant, à
cause de l'incitation et de l'appui toujours présents de l'Ajusteur de
Pensée, cette âme a atteint un bon degré de bonheur et de succès et s'est
élevée dès maintenant aux salles de jugement du monde des maisons ».
[Présenté par un Messager Solitaire d'Orvonton.]
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